petit historique des origines du vignoble français (Gaule)

  • la vigne sauvage poussait en Gaule, mais pas de preuves d'utilisation particulière, et de toutes façons pas de vin.
  • Boisson fermentée traditionnelle en Gaule : bière (cervoise) et hydromel
  • qui vivait en Gaule ? peuplades celtes origine germanique, sur un fond plus ancien inconnu (sauf dans le sud, peuple Ligure.)
  • les Grecs débarquent à Marseille, fondent un petit comptoir, et commercent avec les Ligures, puis avec les Gaulois du littoral languedocien.
  • Puis ils remontent la vallée du Rhône (eux ou des commercants gaulois) et approchent les peuples gaulois des régions alpines, lyonnaises, bourguignonnes. Le commerce entre vin d'un côté et métaux de l'autre est florissant. Mais le vin est juste destiné aux très riches dignitaires gaulois (rois, nobles) et reste instrument de reconnaissance, de pouvoir.
  • Puis le clergé et quelques chefs gaulois réagissent contre cette boisson : pendant 2 siècles, disparition totale de toute trace de vin, d'amphores. Certainement réaction politique et religieuse pour défendre la culture gauloise, et rejeter la boisson de l'étranger qui corrompt la société.
  • Les Gaulois envahissent le sud, puis l'Italie, la Grèce, jusque à la Turquie. Mélange et découverte d'autres cultures, et du vin. Terreur des populations romaines, et mythe du Gaulois ivre de vin.
  • Ier s. av. JC : les Gaulois adoptent de nouveau le vin, mais toujours d'une façon élitiste. Les chefs organisent des grands banquets « électoraux ». Les druides aussi commencent à intégrer le vin dans leur culte.
  • Puis les Romains envahissent et conquièrent la Gaule. La colonisation se met rapidement en place par l'arrivée et l'installation des vétérans à qui on offre des terres, et qu'ils mettent en culture avec la vigne. C'est le vrai départ de la viticulture en Gaule.
  • Les domaines fleurissent au 1er siècle dans toute la Gaule, Languedoc-Provence, Vallée du Rhône, Aquitaine-Bordeaux, Bourgogne (assez tard), Moselle ? La Gaule devient rapidement grosse productrice de vin, exporte vers Rome, vers l'Angleterre (déjà !). Les cépages se diversifient, avec la plantation dans de nouveaux climats plus froids que traditionnellement.


Diversité des cépages géorgiens



Rencontre avec Giorgi Samanishvili, oenologue géorgien qui (entre autre) travaille pour le  "National Centre for Grapevine and Fruit Tree Planting Material Propagation". Il s'agit d'un conservatoire des cépages géorgiens créé depuis l'effondrement et le départ des soviétiques pour retrouver et préserver la diversité ampélologique de ce pays berceau de la viticulture (voir post
 Balade sur le site avec un guide éclairé, et dans un français... remarquable !



Caucase, lieu de création...

Je me souviens d'un livre sur les arbres, une flore qu'on avait quand j'étais enfant, où l'on décrit les arbres de nos régions d'Europe. Dans un coin, au bas de la description, il y a l'origine connue ou supposée des espèces. Et, je ne sais pas, mais j'avais l'impression qu'à chaque fois que je regardais l'origine de nos arbres, tous, ceux des parcs, des forêts ou des vergers, les ormes, les charmes, les platanes, les pommiers, les poiriers, les abricotiers que sais-je, sans parler des arbustes, des arbrisseaux, des taillis, des haies... bref, à chaque fois...  origine : Caucase, Asie Centrale ou Orientale. Mais vraiment ; Caucase revenait me semblait-il systématiquement.
Depuis j'ai repris les flores, finalement non, tout ne vient pas de là-bas.
Mais tout de même, cette région, cette profusion, cette diversité géographique, des reliefs, des climats, des micro-climats, l'influence chaude et humide de la mer Noire, l'influence froide et humide de la Caspienne, les vents glacés qui descendent des crêtes qui dépassent 5 000 mètres, le courant d'air chaud coincé entre le Petit et le Grand Caucase, le souffle brûlant des déserts d'Iran et de Syrie qui remonte et se glisse vers l’Azerbaïdjan .. Oui, le Caucase a tout pour réveiller la nature, la vie, la folie biologique, toutes les espèces peuvent se donner rendez-vous ici et convoler, expérimenter, inventer, avant de conquérir le monde...
Et les homme aussi !!!
Caucase, la montagne des langues, où la moindre vallée abritait un peuple différent, une langue autre, Babel n'est rien à côté de la montagne magique...


Quand le vin arrive en Gaule


"Aimant jusqu'à l'excès le vin que les marchands leur apportent sans mélange, ils en boivent si avidement que, devenus ivres, ils tombent dans un profond sommeil ou dans des transports furieux. Aussi beaucoup de marchands italiens, poussés par leur cupidité habituelle, ne manquent-ils pas de tirer profit de l'amour des Gaulois pour le vin. Ils leur en apportent soit dans des bateaux sur les rivières navigables, soit sur des chars qu'ils conduisent à travers le pays plat; en échange d'un tonneau de vin, ils reçoivent un jeune esclave, troquant ainsi leur boisson contre un échanson"
Diodore de Sicile (V,26) Bibliothèque Historique, Ier siècle av. JC.

Ma nuit au néolithique # 3


On vit ici, et nous avons un secret, un don des esprits dont nous prenons soin, une tradition dont les anciens parlent avec respect, avec crainte aussi car personne du village ne peut expliquer quel sortilège, quelle force mystérieuse agit sur notre potion magique ! Chez nous, on prépare le vin, un de nos ancêtres a un jour découvert, inventé comment conserver le jus des raisins au lieu de les manger tout de suite, il les a mis dans un creux de rocher, ou dans une calebasse, ces récipients pratiques qui nous servent à tout, et les esprits sont venus et ont transformé le jus en vin, la boisson des esprits qui emporte l'âme des humains dans des mondes interdits...


Et c'est un grand évènement d'avoir inventé le vin, parce que ça, les animaux ne savent pas le faire, ils ne connaissent pas la gomme du térébinthe qui pousse dans les collines et qui conserve le jus fermenté pendant la saison chaude, ils ne connaissent pas les poteries de terre que maintenant on enterre dans le sol, bien bouchées d'argile, pour que le vin reste à l'abri des rayons du soleil et des chaleurs trop fortes...

Oui, le vin est bien une invention des hommes, un signe de notre créativité, de notre intelligence, de notre esprit curieux, un goût du jeu, du risque, du plaisir et d'une aspiration à l'éternel. 

Fondation de l'abbaye de Cîteaux # 1



Quand on se penche sur les circonstances de la fondation de Cîteaux, et de l'ordre cistercien, il y a un fait qui étonne toujours, qui laisse un peu songeur... Il s'agit de la frénésie de création de nouveaux sites monastiques à cette époque, ainsi que de la quantité de petits groupes de moines, ou de religieux de tous poils qui essaimaient un peu partout. Disons en tous cas sur le territoire bourguignon par exemple.

C'est en lisant l'itinéraire de Robert de Molesmes, fondateur de Cîteaux que l'on découvre cette réalité.
Il naît près de Troyes (1029). A 15 ans, il rentre dans les ordres. Il y devient prieur (1053, il a 34 ans). En 1069, à 40 ans, il est appelé près de Tonnerre (Yonne, à 100 km de Troyes) pour diriger quelques moines. Ça ne se passe pas trop bien, la règle n'est pas assez strictement observée, il revient à Troyes. En 1072 (43 ans) il part à Provins. Puis il rejoint un groupe d'ermites dans la forêt de Colan (1074). Il les emmène à Molesme (Côte d'Or, juste en limite de l'Yonne) (1075)(46 ans) où il fonde une nouvelle abbaye. C'est un véritable succès, les donations abondent, le monastère devient très riche et s'étend sur la région : 35 prieurés en dépendent en 1098, 23 ans plus tard !
Mais ce développement rapide ne convient pas à Robert, la richesse surtout qui corrompt l'esprit presque ermitique dont il rêvait. Il part plusieurs fois à Aux en Savoie (entre 1090 et 1093)(60 ans). Puis il revient diriger Molesme. Finalement, le pape l'autorise avec quelques autres à partir fonder un nouveau site pour être plus près de la Règle de Saint Benoît.
Il partent et s'installent dans la vallée de la Saône au sud de Dijon en 1098 (70 ans) dans un lieu de "cistels" (roseaux). Cîteaux est né.
Les débuts sont difficiles, mais les soutiens politiques et financiers sont fermes, et la nouvelle abbaye survit. Encore une fois, ceux de Molesme le rappelle et Robert y retourne et meurt en 1111 (83 ans).

Le fait remarquable est cette persévérance dans la recherche d'un établissement monastique qui réponde profondément à l'élan mystique du nouveau millénaire. Cluny avait inventé un idéal monastique, avait ouvert la perspective d'une véritable installation de la recherche mystique, mais le succès et le temps l'avait réduite à pas grand-chose, du moins son idéal s'était raccorni. Alors partout des vocations, des êtres inspirés sont repartis en quête d'une vie plus pure, plus parfaite, et d'une structure pouvant l'abriter.
Les "puissants" soutenaient ces êtres sincères et convaincus qui pouvaient leur assurer une certaine clémence divine, et du coup, les expériences se sont multipliées à l'époque. On est à l'orée de l'ère féodale, et le territoire s'est stabilisé dans son partage entre rois, ducs, seigneurs etc. L'église pousse aussi par tous les moyens à l'acquisition foncière et l'apparente innocence des moines et des monastères arrange certainement les deux pouvoirs, seigneurial et ecclésiastique.

Du coup, Robert, personnage certainement inspiré par une véritable vision mystique se débat-il toute sa vie pour trouver sa voie, son site, soit qu'il existe déjà, soit qu'il faille le créer de toutes pièces, et recommencer encore si ce n'est toujours pas la bonne formule !


sources :
http://www.encyclopedie-universelle.com/abbaye-cisterciens.html
http://users.skynet.be/am012324/exordium/fra/2.pdf
http://www.bm-dijon.fr/opacwebaloes/index.aspx?idpage=165

Rayures



Venise, ville bâtie dans l'eau, sur l'eau, sous l'eau... et pourtant c'est le vin qui a permis ces palais, ces reflets.

Cimetière de kvevri

dans une ancienne "usine à vin" de l'époque soviétique en Kakhétie, on aperçoit le dos rond reconnaissable des kvevri, les immenses jarres traditionnelles de Géorgie... et qui remontent à l'Antiquité, les Grecs utilisaient cela aussi. On les enterre dans le sol et la température est régulée.
On s'arrête,... tournage.
Et rencontre avec David Chichua, spécialiste. Je mettrai l'interview en ligne bientôt.
En attendant, ballade dans un monde étrange de cruches géantes, le cellier de divinités bacchanales, la démesure et l'étrangeté de ces poteries abandonnées.


(musique Georgika - Xvaramze)
Association Kvevri :  http://www.kvevri.org/fr/index.html

galère et réconfort (retour de tournage)

Retour de tournage en Imereti - Géorgie.
Il a neigé le matin, bon, on y va quand même, il faut rentrer à Tbilissi. 3/4 heures de route normalement.
On décide de passer par la montagne, un col pas trop haut, ça devrait passer.
Et le col, ça passe. On se dit que c'est bon, on s'engage dans la longue vallée qui longe l'Ossétie... on est à 5 kilomètres seulement de la frontière où les Russes ont fait la guerre il y a 4 ans... (et sont toujours là, avec les chars). Il n'y a pas un village, rien, 30 km de désert glacé... et les emmerdes commencent !!!


Finalement, après 3 heures d'efforts, 5 poses de chaînes, les doigts gelés, l'angoisse de se trouver bloqués là, au milieu de nulle part, on passe enfin !!!
Et voilà le genre d'endroit merveilleux que l'on trouve après, sur cette petite route perdue. Ça vaut bien toutes les galères ! Le meilleur khadjapuri de Géorgie, je vous le dis :)




Petit cours d'archéo-botanique avec Nana

Rencontre au Musée National, dans la salle aux trésors ; on restaure le Musée pour une inauguration prochaine, et les chercheurs ont entassés leurs collections dans d'immenses salles en attendant, sous les plastiques. C'est mystérieux, émouvant, presque érotique : qu'est-ce que ces voiles blancs nous cachent, nous réservent, quelles merveilles, quelles surprises ?
(voir post Musée Secret)
On est là pour parler du vin des origines, mais Nana Rusishvili, ne l'entend pas de cette oreille, elle veut aussi parler du blé, qui est l'objet véritable de sa recherche :
le passage du blé sauvage au blé domestiqué, au néolithique.
Décidemment, cela peut bien se rapprocher de notre recherche sur la vigne des origines (voir (voir post A l'origine des origines)
Nous faisons l'interview :

Nana Rusishvili:
"Ce n'est pas prouvé, mais on peut penser que la vigne cultivée Vitis vinifera vient de la vigne sauvage Vitis sylvestris. Cela s'est passé sur le continent d'Eurasie où se trouve la vigne sauvage, dans les forêts. La Géorgie fait partie de cette région, et les preuves les plus tangibles qu'on ait depuis la période du néolithique dans les habitations, ce sont les fouilles de Arukhlo et Khamis Didi Gora qui appartiennent à la culture Shulaveri-Shomu Tepe. C'est grace aux pépins, d'après les études morphologiques, que l'on peut savoir si ils sont cultivés ou sauvages. Et justement on a prouvé que les pépins enterrés dans les habitations de la période néolithique appartiennent à la vigne cultivée, Vitis Vinifera.
Comment fait-on l'identification de ces pépins ? C'est par la forme et par les gênes. Et dans les fouilles, les pépins répondent à tous les critères de la vigne cultivée.

Ce n'est pas un hasard si la vigne est déjà cultivée, vu les outils que l'on a trouvé, qui nous montrent que l'agricultiure était déjà bien développée. Si la vigne était déjà domestiquée, c'est le résultat de ce développement avancé dans cette culture du néolithique.


Une des preuve de cette agriculture développée sur ce territoire, on la trouve sur les traces de blé sur une brique des maisons. (Elle nous montre une empreinte de végétal, on reconnait bien la forme du blé dans un fragment d'argile) Ca, c'est le blé "mou", ou blé tendre ! Et ce blé "mou" correspond à un stade d'évolution assez avancé ; on peut dire qu'au 6ème millénaire, le blé "mou" existait déjà. D'ailleurs, le blé avec lequel on se nourrit aujourd'hui, c'est ce blé "mou". En nettoyant les briques qui formaient les maisons dans les fouilles archéologiques, on a trouvé des traces de grains de ce blé.
Le blé sauvage est dur à travailler, c'est difficile d'extraire le grain de l'épi. Mais le blé sauvage arrive à se reproduire seul en tombant sur le sol quand il est mûr. Quand les gens ont commencé la domestication, ils ont fait la sélection instinctivement, ils ont choisi les espèces les plus faciles à travailler; et de plus en plus avec le temps, on a obtenu, non seulement du blé plus facile à travailler, mais on voit par exemple à Arakhlo apparaître le blé à 42 chromosomes (qui est la mutation génétique caractéristique du blé moderne, le blé tendre, alors que les formes plus primitives sont à 24 chromosomes), le blé "libre" avec les grains nus (donc plus faciles à extraire).

On dit que le Caucase, c'est la montagne des langues, mais on pourrait dire la même chose à propos du climat ; ici on trouve le climat de presque tout le monde entier. On a la mer, la montagne, le désert, le climat sub-tropical, et justement c'est cette diversité climatique a causé la diversification biologique. Par exemple pour le blé (ah ah, nous y revenons !) dans le monde entier on trouve 28 sortes de blé dont 21 sont originaires de Géorgie ! Dont 5 endémiques, qu'on ne peut pas trouver ailleurs ! Il y a 500 cépages de vigne en Géorgie et justement, cette diversification est causée par la diversité climatique qu'on trouve sur un aussi petit territoire.


Je peux parler aussi de la culture Koura-Araxe (du nom des 2 grands fleuves trans-caucasiens qui se jettent dans la Caspienne) qui suit la période néolithique. Les pépins de raisin que l'on a trouvé sont de plus en plus gros, ce sont des pépins des raisins de table.

(Puis elle cherche quelque chose, et elle nous montre des pépins dans une petite boîte) Ces pépins, trouvés à Kadashvili Gora, sont plus petits que ceux des raisins de table. Ce sont les premiers pépins trouvés dans le monde entier !! Ca veut dire qu'ils ont 3 000 ans de plus que tous les autres trouvés ailleurs ! Ils datent du 6ème millénaire avant notre ère. Les premiers après ceux là, on les a trouvés en Jordanie, et là-bas, les chercheurs pensent que c'est une forme intermédiaire entre cultivé et sauvage, et on les date du 3ème millénaire. Alors que ceux-là sont des pépins du 6ème millénaire, et ce sont de la vigne domestique !!

On trouve toujours le blé dans l'histoire, on trouve toujours la vigne, on peut dire que ce sont 2 cultures liées, comme on a toujours le pain de la vie, on a toujours la vigne et les pépins (!)."


Le tournage continue, puis on va boire un... café dans une autre pièce. On parle vin, comme toujours, chacun a ses histoires, ses connaissances, ses expériences. Nana parle de certains cépages très locaux, très anciens. Décidémment, le vin, toujours, touche les Géorgiens de tellement près !

voir "Distribution Dika Wheat in Georgia"  N. Rusishvili, T. Jinjaikhadze, I. Maisaia  Tbilisi 2010